Comme son nom l'indique, La Légende de Despereaux est une histoire d'aventures. Seulement voilà : Despereaux, c'est une souris. Et sa légende, c'est lui qui décide de se la créer, après avoir lu un livre sur ce qui ressemble fort aux Chevaliers de la Table Ronde : il repère une princesse qui a l'air malheureuse, et décide de la sauver. Celle-ci reste enfermée dans sa chambre en attendant le retour de la pluie, qui a arrêté de tomber quand le roi a interdit la soupe. Cette étrange décision vient du fait que la reine est morte à cause d'un rat tombé dans son potage. Le rat, lui, se retrouve du coup dans la sombre cité des rats, sans lumière, sans lois. Oh, et la servante de la princesse aimerait bien être princesse aussi, et du coup, se laisse facilement influencer. Oui, vous l'aurez compris : pour un dessin animé pour enfant, l'histoire de La Légende de Derspereaux est particulièrement développée.
Et non seulement l'histoire est donc développée, mais en plus les sentiments exprimés sont complexes et multiples. On est loin de la ligne directrice simple, du gentil qui combat le grand méchant. Ici, la cause de tout le mal est un simple accident, la décision du roi vient de sa trop grande douleur, une tentative d'assassinat est initiée par des frustrations cultivées… les histoires sont diverses, les personnages profonds, et les lignes se croisent et se complètent ; et pourtant, tout reste clair, et la multiplicité des voix ne tombe jamais dans la confusion.
Mais malgré la complexité du film, qui du coup le rend parfaitement agréable aux plus vieux, les enfants ne sont pas mis de côté. Une narratrice (un narrateur en français : André Dussollier), à la présence absolument pas dérangeante pour une fois, permet de mettre à leur portée les sujets pourtant délicats et les thèmes difficiles – on aborde tout de même ici des notions qui peuvent être ardues comme le pardon ou le deuil, et même la question de jusqu'où on est capable d'aller quand on est blessé ou malheureux. Des sujets loin d'être niais, donc, rarement abordés dans un dessin animé pour enfants mais qui sont pourtant très bien traités ici – précisons que le scénario est une adaptation d'un livre pour enfants écrit par Kate Dicamillo.
Mais tout n'est bien sûr pas sombre dans La Légende de Despereaux. Le dessin animé sait placer, sans être hilarant, des touches d'humour rafraichissantes qui tombent juste, et on peut y trouver des clins d'œil plutôt intelligents (on craint d'ailleurs un instant une trop grande filiation à Ratatouille, particulièrement avec la course poursuite dans la cuisine du rat chassé par des chevaliers, mais on s'aperçoit vite que non). Et qu'on se rassure : c'est une légende, alors on y vante bien les mérites du courage et de l'honneur, même si c'est fait curieusement : parce que le courageux, justement, se fait bannir pour ne pas savoir avoir peur correctement, dans une société où lever la tête est considéré comme déplacé – il est facile alors de faire des parallèles avec l'actualité. De plus, les souris sont toutes mignonnes et leur ville très bien faite (il faut dire aussi que Sam Fell, l'un des deux réalisateurs, a aussi coréalisé Souris City ; ça aide). Le tout baigne dans un ton onirique, parfaitement retranscrit par le dessin pale et tranquille. Et pour finir, comme preuve des possibilités de Despereaux, nous avons son casting anglais impressionnant ; les plus habitués à la vo pourront reconnaître les très nombreux acteurs qui y ont participé.